Adriana Karembeu n’est plus vraiment une pizza aux anchois
Pendant longtemps, une simple recherche « pizza aux anchois » sur Google Images affichait fièrement le visage d’Adriana Karembeu. Non, ce n’était pas un bug, ni un hommage gastronomique à la mannequin slovaque. C’était une expérimentation SEO volontaire, aussi drôle qu’édifiante. Mais aujourd’hui, si cette image n’a pas disparu des radars de Google, la voilà reléguée loin dans les résultats. Que s’est-il passé ? Petite histoire d’un détournement d’algorithme et d’une leçon de référencement toujours d’actualité.
Une expérimentation SEO qui tourne au cas d’école
En 2011, l’agence AxeNet décide de tester les limites de Google Images. « Elle avait créé un site de test, fait pour valider ou invalider certains comportements du moteur », se rappelle Daniel Roch, consultant SEO chez SeoMix. L’idée derrière une des expérimentations est simple : « À quel point Google utlise-t-il le texte alternatif et le contexte de l’image pour la positionner ? »
À l’époque, Google était très bête.
L’image d’Adriana Karembeu est insérée dans une page parlant de pizza aux anchois, avec une balise alt soigneusement rédigée et un contexte textuel bien calibré. Le moteur de recherche tombe dans le panneau. « À l’époque, Google était très bête. Il n’y avait aucune analyse visuelle. Là, le test prouvait par A plus B que Google prenait bêtement et méchamment le texte alternatif de l’image pour la positionner. »
Quelques backlinks viennent renforcer la page et, rapidement, l’image grimpe au sommet des résultats. « Même si la page disait explicitement que c’était un test SEO, ça n’empêchait pas Google de la classer en tête. » Le moteur s’appuie exclusivement sur les signaux textuels : alt, texte environnant, popularité. « C’était comme les balises meta keywords quelques années auparavant : Google les prenait au pied de la lettre. » Résultat : pendant des années, Adriana Karembeu devient malgré elle l’illustration de la pizza aux anchois.
Pourquoi un classement si haut pour l’Adriana aux anchois ?
Mais comment cette photo qui n’a rien à voir avec le sujet est restée si bien positionnement pendant tant d’années ? Quelques années plus tard, Daniel Roch et son agence constatent que Google détient bien une technologie brevetée permettant d’analyser une image. « Google est parfaitement capable, s’il le souhaite, de prendre une image et de dire ce qu’elle représente. La seule raison pour laquelle il ne le fait pas, c’est le coût potentiel. » Ainsi, cette photo d’Adriana Karembeu associée à des dizaines de pizzas aux anchois dans les résultats de Google Images amuse pendant des années. « Elle faisait rire, elle était partagée en formation SEO… donc elle recevait des clics », explique Daniel Roch.
Des clics qui ont des conséquences : « Certaines fuites de documents liés au procès de Google ont démontré la puissance d’un algorithme, NavBoost, qui vient redéfinir la position des contenus a posteriori en analysant les clics et les comportements utilisateur. » C’est l’une des raisons ayant permis à Adriana Karembeu de conserver sa position dominante auprès des amateurs de pizzas. Mais c’est peut-être aussi celle qui explique son déclassement progressif…
Toujours là, mais bien plus bas : les raisons du déclassement
14 ans après cette expérimentation, la photo est toujours indexée par Google, mais beaucoup moins visible. « Elle n’a pas disparu, mais elle est reléguée loin dans les résultats », confirme Daniel Roch. L’explication est multiple. D’abord, le site hébergeant l’image serait brièvement passé en erreur 404. « De mémoire, la page était inaccessible et, une fois qu’une image n’est plus disponible, Google la dévalorise. Même remise en ligne, elle peut ne pas retrouver sa position initiale, remplacée par d’autres contenus. Le crawl et l’indexation sont plus lents sur Google Images. »
L’autre facteur lié, selon Daniel Roch, c’est NavBoost. « Moins cliqué, le contenu a logiquement perdu en positionnement. » Longtemps, la photo est restée soutenue par une popularité organique inattendue, mais avec une page indisponible quelque temps associée à un outil comme NavBoost, la photo a mécaniquement perdu son bon référencement. « Google pourrait faire beaucoup mieux, avoir une bien meilleure analyse sémantique ou de la qualité des contenus », afin que ce type de bug ne puisse se reproduire. « Mais tant qu’ils n’ont pas les moyens pour, ils ne le feront jamais. »
En 2025, il faut scroller un peu pour retrouver Adriana Karembeu au milieu des pizzas aux anchois :
Le SEO visuel reste manipulable
Peut-on encore tromper Google Images ? « Pour moi, c’est toujours faisable », affirme Daniel Roch, même si cela sera « plus dur qu’avant ». Mais la méthode reste globalement la même qu’en 2011. « Il faut un bon contexte sémantique, une page bien construite, quelques backlinks… et surtout un site cohérent dans son ensemble. » Publier une image absurde sur un site sans rapport ne suffira plus : Google valorise les contenus ancrés dans une thématique forte. « Si je fais ça dans un site sur les pizzas, ça peut marcher. Mais sur un site généraliste, c’est plus compliqué. »
Ce qui n’a pas changé, c’est la nature des signaux. L’algo s’appuie encore sur le texte, les liens, le comportement utilisateur. Même les AI Overviews, dont l’arrivée en France semble imminente, restent vulnérables : ces résumés générés par IA dans les résultats de recherche « se basent sur les contenus déjà bien positionnés. Si on manipule le référencement classique, on influence aussi l’IA ». D’où l’intérêt de continuer à enseigner cette histoire. « L’exemple d’Adriana Karembeu reste un cas d’école. Les leviers SEO de base (balise alt, contexte, popularité) sont toujours valables. »
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Abdel khalik Abdel khalik
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